Première étape : Nouvelle-Zélande
« La dernière personne que j’ai amené sur ce spot s’est explosé le genou sur son premier essai, » me dit Hamish Bourke, notre caméraman, avec le sourire. « Ça nous a pris un temps fou pour le transporter de la piscine inférieure jusqu’à ce foutu mur. C’était un p****n de combat ! »
Je fixe une énorme cascade de 4 mètres dans une crique cachée sur le côté de la route, quelque part en dehors d’Auckland. C’est le premier jour de notre aventure en Nouvelle-Zélande – un voyage qui va nous mener sur la route entre Auckland et Queenstown. Je suis dans un pays étranger, essayant des nouveaux spots de wake un peu douteux sur lesquels nous sommes tout de suite tombés. Ça peut paraitre fou, mais c’est exactement ce que je voulais.
J’ai passé les 5 dernières années de ma vie à voyager de compétition en compétition, neuf mois par an, la plupart du temps sur les mêmes wakeparks. Les mêmes spots. Encore et encore. Non-stop. J’avais besoin que 2017 soit différente. Qu’elle m’apporte quelque chose. Je voulais visiter de nouveaux pays, des endroits où la rumeur d’un spot incroyable plane chez les riders, où les spots ont étés découverts, pas fabriqués. Je voulais trouver de nouveaux endroits où rider…loin des parks. Je voulais plus, je voulais explorer.
J’ai toujours été fasciné par les iles. Il y a tellement d’eau, tellement de baies et de rivières, d’estuaires, de criques et de cascades, tant d’opportunités pour trouver de nouveaux spots de wake. J’ai pensé à la Nouvelle-Zélande après avoir vu une vidéo des quelques petits spots incroyables. Ils ne disaient pas où c’était, mais j’étais sûr que c’était en NZ.
Puis j’ai vu la vidéo de Mick Fanning « Irish Crossroads » et ça m’a donné envie de m’envoler pour Dublin. Je n’étais jamais allé en Irlande, mais comme c’est juste à côté du Royaume-Uni (qui est ma base en Europe pendant la saison d’été) cela m’a paru évident que je devais y aller.
Et donc ça s’est fait comme ça. Deux iles. Une dans l’hémisphère nord, une dans l’hémisphère sud. Un peu comme ma vie, ayant grandi entre la Thaïlande et l’Angleterre.
Ca y est, j’y suis, devant cette cascade verticale qui hurle à quel point elle veut me casser les genoux.
La bataille débute donc. Je dois nager à contre-courant tout en haut d’une chute d’eau. En sautant, la corde s’est prise dans la branche d’un arbre proche – Je suis dans les airs, et elle ne s’enlève qu’au moment où je tombe dans l’eau. Cela signifie aucune tension du palot qui me tire, ce qui rend l’impact encore plus puissant. Huit essais et une tonne de galères plus tard, on finit par réussir à avoir un clip qui en vaille la peine. J’ai vraiment eu de la chance que mes genoux aient tenus. Sinon je ne sais pas comment ils m’auraient sorti de l’eau.
Sinon, la Nouvelle-Zélande est magnifique. Il y a tellement de beaux paysages et c’est le meilleur endroit pour un road trip à la campagne. Les montagnes sortent de nulle part et les transitions entre chacune sont incroyables. J’ai l’impression que chaque élément naturel de ce pays prie pour qu’on le ride. Hier je me suis fait tirer par un 4×4 sur la plage – c’était une nouvelle expérience pour moi et quelque chose de tellement facile à mettre en place. Je veux faire commencer dès que j’en ai l’occasion. Si seulement on avait des plages sans fin et des cours d’eau comme ceux-là chez moi à Bangkok !
Nous avons passé la majeure partie du trip à trouver des mini spots dans la mangrove, des jolis rebords pour slider et un gros drop de 4 mètres pour le petit-déjeuner…Parfait ! Beaucoup de ces spots étaient très accessibles – un en particulier où le palot tenait parfaitement sur un rebord et il me suffisait de remonter la corde jusqu’à ce que je sois prêt à repartir. En plus de tout ça nous avons aussi trouvé un super skatepark. C’est incroyable le nombre de skateparks communaux qu’il y a en Nouvelle-Zélande. Passer devant des carrières abandonnées, des ruisseaux et des élevages de saumons permet de voir tout le potentiel qu’il y a. Il suffit juste de l’exploiter. Tout est là. C’est comme si ce pays avait été créé par un wakeboarder. Nouvelle-Zélande je t’aime.
Deuxième étape : Dublin, Irlande
Alors que notre avion descend, on aperçoit la beauté de l’Irlande. La terre est si verte et le soleil brille. Je sors tout juste d’une série de compétitions, et je suis prêt pour l’aventure. C’est ma première fois dans ce pays à la longue histoire, et tout ce à quoi je pense c’est à la Guinness, aux patates et aux leprechauns.
J’ai sauté dans mon vol pour Dublin via Londres pour rencontrer le prometteur wakeskater Britannique James « Mini » Harrington. Nous retrouvons notre guide Ron à l’aéroport, chargeons les sacs dans les voitures, et mettons le cap vers là où on restera pour quelques jours. Sur notre chemin nous traversons un pont avec des rebords en béton symétriques. Même pas 20 minutes après notre arrivée en Irlande, on a déjà trouvé un spot. Rien d’incroyable, mais c’est une façon géniale de commencer le trip. Trouver un spot n’a jamais été aussi rapide et facile. L’ile émeraude nous prouve déjà qu’elle regorge de leprechauns wakeboarders avec des pots remplis d’or.
Mes yeux sont encore fatigués du matin, mais l’adrénaline remonte en regardant Google Maps à la recherche du moindre petit barrage, fossé ou même flaque que l’on peut trouver dans ce pays pluvieux. Ron nous parle de ce gros quai qu’il connait en ville. Nous arrivons sur ce spot en plein centre-ville, entouré de buildings, de voitures et de gens marchant pour aller au travail. C’est comme trouver un spot de wake en plein Time Square.
On se rend compte tout de suite que ça sera compliqué à réaliser. C’est vraiment pas discret et la police ou la sécurité viendront forcément nous empêcher de rider ce spot. Ron pointe du doigt des gens organisant ce qui ressemble à une course d’aviron sur cette voie d’eau. Nous avons donc la brillante idée de faire semblant de travailler sur l’évènement. On a eu de la chance depuis le début…donc pourquoi notre plan ne fonctionnerait pas?
Je me cache dans le coin de rue pour enfiler ma FlashBomb pendant que Ron et Mini sortent le palot de la voiture pour le mettre en place. Ron entoure l’endroit de ruban jaune pour donner un air officiel. Tout semble se passer comme prévu, je sors donc avec ma planche, passant devant les gens en costume qui me regardent bizarrement. J’ai continué mon chemin sans y faire attention…après tout, je vais travailler moi aussi.
Je mets donc mes fixations et me prépare à donner le signal à Ron quand, au loin, je vois l’agent de sécurité se diriger vers nous. Je hurle en direction de Ron, espérant qu’il ait le temps de démarrer le moteur avant que l’on soit stoppé. Mais c’est déjà trop tard. L’agent de sécurité coure vers moi et m’empêche de partir. On essaye donc de négocier mais il ne change pas d’avis, et c’est lorsqu’il se met à appeler du renfort sur son talkie-walkie que l’on décide de partir. On remballe alors tout le matos et partons à la recherche du prochain spot.
En Irlande, il y a des châteaux partout. Heureusement pour nous, beaucoup de ces châteaux ont des douves… douves qui ont la caractéristique d’être parfaites pour le wake. Pendant notre voyage dans le pays, nous cherchons la meilleure et finissons par la trouver. C’est un énorme drop qui se trouve dans ce qui ressemble à un décor de Game of Thrones. Alors que nous nous préparons, une petite foule se forme autour de nous, les passants se demandant pourquoi quelqu’un nage là-dedans avec une corde et une combinaison sur lui. Ils ne se doutent pas que je suis sur le point de me faire tirer hors de l’eau et faire l’énorme saut qui se trouve en face d’eux. C’est là que je me rends compte à quel point ces moments sont importants…comment cet intérêt peut aider à faire connaitre le wakeboard. Au lieu d’essayer d’attirer les gens à une compétition dans un wakepark, on essaye d’amener le spectacle directement aux gens.
C’est maintenant notre dernier jour et on a quelque chose à terminer. Nous retournons sur le spot en or du centre-ville, celui que nous n’avions pas pu rider. Le spot est tellement parfait, nous nous devions d’y retourner pour essayer une autre fois. Jusqu’à maintenant, tout ce que nous avons eu c’est des sauts et des rampes. On a faim de gros rebords à slider. Donc on se prépare, sachant qu’il faudra être rapide. Je suis déjà en train de mettre ma combi à l’arrière du van pendant que Ron prépare le palot et Mini la caméra. Je saisi littéralement la corde et me rue sur le spot. Je me répète « Ca va être réglé du premier coup. »
Et effectivement, c’est dans la boite 15 minutes seulement après notre arrivée. Quelle fin de trip. Les moments comme celui-ci sont ce que je préfère dans mon job. Pour fêter ça, on se trouve un petit resto et mangeons un bon petit-déjeuner irlandais…et une tournée de Guinness pour tout le monde. Nous levons nos verres à ce beau pays, et à tous les gens qui le font.
« A l’Irlande ! Où le wakeskating n’est pas un crime ! »